Ignorée de beaucoup ce statut juridique très peu usité ne date pourtant pas d’hier puisqu’il existe depuis 1917 ! Il présente l’originalité d’allier travail et capital et peut représenter une solution d’avenir pour les entreprises d’aujourd’hui.

Actions de capital et actions de travail

C’est la loi du 26 avril 1917 qui a créé ce statut très particulier. Aujourd’hui les textes sur les Sapos ont été intégrés dans le Code du commerce où on les retrouve sous les articles L225-258 à 270 .
Comme son nom l’indique la Sapo est d’abord une société anonyme (SA). Elle est donc constituée d’actionnaires qui ont réuni des capitaux autour d’un projet d’entreprise. Chaque actionnaire est détenteur d’un pouvoir (par le droit de vote en assemblée générale) et d’une participation au bénéfice (par la distribution de dividendes) proportionnels à son apport. Jusque là rien de bien original : on retrouve les principes classiques de la SA (voir la fiche SA  sur le site Lise). L’originalité du statut réside dans les deux autres lettres de son acronyme : PO pour participation ouvrière. Concrètement cela signifie qu’ à côté des actions de capital sont créées des actions de travail qui appartiennent aux salariés de l’entreprise. L’action de travail ouvre aux mêmes droits que l’action de capital : vote en AG et participation aux bénéfices – même si cette dernière ne peut se faire qu’après le versement d’un « premier dividende » aux actionnaires de capital (Cf. article L225-261 alinéa 3  du Code de commerce ).

Quelle participation ouvrière ?

Avec les actions de travail, les salariés de l’entreprise (ouvriers et employés) sont donc co-actionnaires de leur outil de travail. Mais contrairement aux actionnaires de capital qui détiennent nominativement leurs actions, les travailleurs sont collectivement propriétaires des actions de travail. En effet, celles-ci sont propriété d’une société coopérative de main d’oeuvre (SCMO) qui, au sein de la SAPO, réunit d’office tous les salariés majeurs ayant un an d’ancienneté. En son sein, chaque salarié y dispose, selon le principe coopératif, du même pouvoir (1 voix), tant qu’il continue à travailler dans l’entreprise. S’il la quitte, il perd automatiquement, instantanément et sans contrepartie, tout droit sur les actions de travail.
La loi a laissé à chaque entreprise la liberté de définir la place qu’elle souhaite donner au travail par rapport au capital. Certaines lui octroient une place minime (moins de 10%) – ce qui ressemble à la mise en place d’un système de participation dans une société qui demeure plutôt capitaliste – d’autres équilibrent les deux (50/50) se rapprochant d’avantage du modèle Scop. Ce rapport qui est inscrit dans les statuts de la Sapo, ne peut être changé sans modifications des statuts – ce qui requiert donc l’organisation d’une assemblée générale extraordinaire. La représentation en Conseil d’administration des travailleurs devra respecter le même ratio.

Un succès très mitigé

Actuellement il n’y a que 7 Sapos en activité en France, dont deux journaux : Nice matin et La République du Centre. En Limousin, la scierie-raboterie Ambiance Bois s’est fait connaître par son fonctionnement original, incarné depuis 1988 par le choix de ce statut (On trouvera du reste sur son site www.ambiance-bois.com  l’ensemble de ses statuts). Dans le passé on recense seulement une vingtaine d’entreprises qui, à un moment ou à un autre de leur histoire, ont opté pour ce statut (la plus célèbre fut la compagnie aérienne UTA). Pourquoi si peu de succès ? Sans doute parce que le choix juridique est à l’initiative des créateurs, donc des apporteurs de capitaux (c’est la SAPO qui engendre la SCMO) et qu’en général ceux-ci n’aiment guère partager leur pouvoir… La Nouvelle République du Centre, qui fut Sapo jusqu’en 2009, en a fait l’expérience : l’abandon de son statut était une condition à l’entrée du groupe Centre-France dans son capital.
Mais le fait que le statut soit si peu connu explique aussi qu’il y ait si peu de Sapo. Pourtant, selon Eric Bouley, un expert comptable auteur d’une des rares recherches universitaires sur le sujet, le statut pourrait intéresser directement les entrepreneurs soucieux de participation : « La forme juridique de Sapo reste toujours d’actualité et peut constituer une des solutions d’avenir pour faire évoluer les formes de propriété des entreprises du XXIème siècle, si les acteurs sociaux le décident. » La Sapo serait ainsi une forme tout à fait adaptée pour le développement d’un actionnariat salarial qui, en donnant aux salariés un pouvoir sur les choix de gestion de leur entreprise et en les intéressant aux bénéfices, va dans le sens d’une participation accrue de chacun aux fruits de leur travail.

Définition: Société anonyme à participation ouvrière

Il peut être stipulé dans les statuts de toute société anonyme que la société est  » à participation ouvrière « . Qu’est ce que cela signifie ? Découvrez-le dans cet article.

La société anonyme à participation ouvrière ou SAPO a été instaurée par la loi du 26 avril 1917. Ce statut n’est pas vraiment très répondu, il ne fait donc pas partie des différents statuts de sociétés coopératives. Toutefois, les démarches de son utilisation au sein de ces derniers sont très intéressantes.

Il s’agit d’une société anonyme possédant des actions en capital et en travail. Ces actions sont la propriété de l’ensemble des employés donnant ainsi naissance à une société commerciale coopérative de main-d’œuvre.

Les conditions pour qu’une entreprise soit considérée comme une SAPO

Voici les conditions pour qu’une entreprise soit considérée comme une SAPO :

    • Il est impératif que tout employé ayant une ancienneté d’au moins un an soit membre de la coopérative.
    • L’assemblée générale de la coopérative de main-d’œuvre doit obligatoirement élire des représentants pour assister aux assemblées générales de la société anonyme.
    • Les statuts de la société anonyme sont tenus de fixer le nombre de voix respectif des actions de capital et des actions de travail. Ce nombre doit être équilibré entre les deux catégories.
  • La société anonyme à participation ouvrière rassemble les apporteur de capitaux et le personnel salarié et attribue à chacun d’entre eux des parts de pouvoirs égales.